L’ANSM pointe un «nombre important de cas d’échecs vaccinaux avec le vaccin Janssen».
Par Anissa Hammadi
Après AstraZeneca, le vaccin Janssen sera-t-il à son tour délaissé ? Dans un rapport publié lundi, l’ANSM (Agence nationale de sécurité du médicament) émet de sérieux doutes sur son efficacité contre le Covid-19, en particulier contre le variant Delta.
« Un signal potentiel a été mis en évidence devant un nombre important de cas d’échec vaccinal avec le vaccin Janssen, avec des patients en réanimation ou décédés du Covid-19, la plupart présentant des comorbidités à risque de forme grave », peut-on lire dans l’enquête menée du 9 juillet au 26 août 2021.
Chargés de suivre les effets indésirables avec le vaccin Janssen, les centres régionaux de pharmacovigilance (CRPV) de Grenoble et de Lyon y détaillent longuement le rôle qu’a pu jouer (ou non) le vaccin dans l’apparition de divers effets secondaires, plus ou moins graves (thrombose, paralysie faciale, AVC, convulsions etc.)
Sur ce point, le bilan est plutôt rassurant : « Ces cas sont isolés et non évocateurs du rôle du vaccin (facteurs de risque identifiés, bilans étiologiques incomplets). (…) À ce jour, il n’y a pas de signal particulier concernant les décès rapportés en France avec le vaccin Covid-19 Janssen. »
Le rapport met surtout en avant un manque d’efficacité du vaccin Janssen contre le Covid-19, et livre une conclusion cinglante : « Compte tenu du nombre de décès et de patients en réanimation, vaccinés par une dose unique de vaccin Janssen dans un délai supérieur à 21 jours, et de l’alerte émanant de deux CRPV (Marseille et Tours) concernant la surreprésentation de patients vaccinés par Janssen en réanimation pour Covid-19, ce signal potentiel relatif aux échecs vaccinaux du vaccin Covid-19 Janssen a été relayé pour investigations supplémentaires (en cours). »
À Marseille, sur 7 patients complètement vaccinés, mais quand même admis en réanimation (c’est-à-dire gravement atteints), 4 l’avaient été avec Janssen. À Tours, cette proportion était de 3 sur 6. Tous ces éléments justifient des « investigations supplémentaires » pour vérifier si les échecs sont plus importants avec Janssen qu’avec les autres vaccins disponibles en France.
Au 26 août, un peu plus d’un million de doses ont été administrées en France avec ce vaccin à vecteur viral. Parmi eux, 32 cas d’infection au Covid-19 ont pour l’instant été signalés (soit un taux de 3,78 pour 100 000). Sur ces 32 cas, 29 étaient graves et 4 décès ont été enregistrés (des personnes âgées de 73 à 87 ans). Ces patients gravement touchés présentaient « majoritairement des comorbidités à risque de forme grave », selon l’ANSM. Pour les 17 cas d’infection où le variant est connu, il s’agissait à chaque fois du variant Delta.
Janssen offrait pourtant l’avantage de ne nécessiter qu’une seule dose. Du moins jusqu’à fin août : il y a trois semaines, la Haute Autorité de santé recommandait que les personnes vaccinées avec le vaccin de Johnson & Johnson reçoivent une deuxième injection d’un vaccin à ARN messager (Pfizer ou Moderna), en raison du « manque de donnée disponible permettant de confirmer l’efficacité à long terme » du schéma unidose. Dans la foulée, le ministère de la Santé a annoncé qu’il allait suivre cette recommandation.
Selon les CRPV de Grenoble et de Lyon, les données « montrent en effet une protection insuffisante conférée par une seule dose de vaccin (Comirnaty, Spikevax ou Vaxzevria) contre les formes symptomatiques liées au variant Delta ». Et les données disponibles « ne permettent pas de confirmer l’efficacité à long terme du schéma de vaccination à une dose du vaccin Janssen contre le variant Delta ».
Pour l’infectiologue Benjamin Davido, « l’histoire de Janssen n’a rien d’extraordinaire » car il n’existe aucun vaccin ni traitement miracle qui permet une longue immunité. « Cela ne s’est jamais vu d’avoir une immunité durable face au rhume et à la famille coronavirus, rappelle-t-il. L’enjeu de cette vaccination est de trouver une combinaison de vaccins qui permettrait de stimuler durablement l’immunité face à une maladie qui, par définition, donne une immunité très transitoire. On pourrait imaginer un panache entre un vaccin à ARN messager et un vaccin conventionnel », c’est-à-dire à protéine recombinante, comme celui développé par Sanofi.
Article originellement publié sur Le Parisien le 13 septembre 2021.